Politikart: Simone de Beauvoir nue : le photographe Art Shay se justifie

La photo de Simone de Beauvoir en couverture du Nouvel Observateur le 3 janvier a créé un buzz phénoménal et agité les féministes, Gisèle Halimi en tête. De surcroît, le Nouvel Obs a été accusé d'avoir retouché la photo. Le magazine a donc contacté Art Shay, le photographe américain qui a réalisé les images en 1952 à Chicago. Par Tessa Ivascu

"Au sens strict, oui cette photographie a été 'volée', au sens où vos féministes l’entendent", admet Art Shay. Il raconte que c'est Nelson Algren, l'amant américain de Beauvoir, qui lui avait demandé de trouver un endroit pour que Madame (comme disait Algren) puisse prendre une douche. "Il m'avait prévenu avec humour qu’une 'Frenchy' fermait rarement la porte de la salle de bains". Shay conduit donc Simone à l'appartement d'une amie.

"Vous devez comprendre que pour moi, Madame n'était pas 'une institution' à cette époque, mais principalement une maîtresse étrangère de mon ami, un homme qu'elle appréciait surtout pour le plaisir qu'il lui prodiguait, bien plus épanouissant que les relations sexuelles qu’elles avaient alors en France. Donc je me trouvais là, photographe stagiaire de Life Magazine (initialement embauché pour porter les sacs et rédiger les légendes), quand j'ai vu Beauvoir émerger du bain et se coiffer devant le miroir. J'ai pris rapidement deux ou trois clichés et elle a entendu le déclic. 'Vous êtes un vilain garçon', a-t-elle dit, mais sans pour autant fermer la porte ni me demander d'arrêter de prendre des photos".

Nelson Algren par Art Shay, 1951.

Art Shay dit comprendre l'utilisation de Photoshop pour retoucher la photo de couverture du Nouvel Obs', même s'il pense "que cela n’ajoute rien, bien au contraire, à la fraîcheur de l’original. Ceci étant dit, je reconnais la nécessité de retoucher les images pour une couverture."

Il dit avoir oublié d'envoyer un tirage de ces clichés à Simone de Beauvoir et ne pas avoir informé Algren de leur existence, mais cela n'avait pas d'importance, puisqu'il ne comptait pas les publier : à l'époque, les photos n'avaient "aucune valeur marchande".

Aujourd'hui, c'est une autre affaire : "Cette photo est l'une des favorites des collectionneurs qui achètent mes clichés à Chicago."

Favorite comme photo de nu ou comme photo de Simone de Beauvoir? On ne le saura pas, tout comme le prix payé par le Nouvel Obs pour en faire sa couv'.

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